Que reste-t-il des Six compagnons quand on a tout oublié ?

Mes souvenirs des Six compagnons sont très flous.
 
Ce qui me vient à l'esprit quand j'essaie de me les rappeler, ce sont d'abord des lieux :
le préau de mon école primaire en CM1 et CM2 : je n'habitais pas loin, la cour n'était pas entièrement clôturée, je m'y rendais pendant les vacances quand il n'y avait personne, je m'installais dans un coin du préau, j'aimais bien lire dans cet endroit déserté, je ressentais une parfaite sérénité, je terminais une aventure, les Agents secrets, je rentrais à la maison en choisir une autre, Scotland Yard, et je retournais tranquillement bouquiner ;
mon lit, dans le coin de ma chambre, tout près de la fenêtre : les livres que je lis à cet âge sont rangés dans une case de mon armoire (les livres de contes et les bandes dessinées sont ailleurs), je reprends la lecture du livre en cours, l’Étang de Berre ou la Fiancée de Kafi, couverture souple, posé sur la table de nuit, j'aime lire dans mon lit quand il fait froid et surtout quand le vent souffle fort, la pluie fouettant les carreaux avec fracas.
 
Se bousculent ensuite dans ma mémoire les titres des aventures, l'énigmatique Âne vert, et les illustrations de couverture, le Cigare volant surtout, l’Étang de Berre aussi (deux couvertures "de nuit").
Le Château maudit, dans la Citadelle, le Mystère du parc, les Voix de la nuit, le Village englouti - ces titres en particulier, dans la liste située au début ou à la fin du livre, étaient intrigants.
Je me souviens assez mal des histoires, je crois que certains titres étaient plus envoutants que les histoires elles-mêmes : pas de sorcellerie dans le Château maudit ; pas d'exploration en sous-marin du Village englouti ; la Citadelle, qu'enfant, je n'avais pas encore visitée, se révélait être un musée-zoo, et non une forteresse imprenable, avec donjon et oubliettes (ceci dit, j'ai visité plus tard avec émotion la Citadelle et son musée de la Résistance).
Je me rappelle les voyages en vélo, la chaleur écrasante ou la pluie retardant l'arrivée à destination (où Mady attend les autres) ; j'aimais que les Compagnons se déplacent par leurs propres moyens, qu'ils se fassent à manger avec un vieux réchaud ou qu'ils dorment dans un hangar, sous une tente ou blottis les uns contre les autres à la belle étoile.
Je crois me souvenir que c'est ce qui m'avait beaucoup plu dans la Pile atomique, alors que j'ai complètement oublié le reste.
Un autre souvenir encore, plus précis celui-ci : un des Compagnons, Gnafron peut-être, répétant dans le Gouffre Marzal, un peu comme un psaume ou un mantra, "les stalactites tombent, les stalagmites montent".
 
Je vais essayer de me procurer et lire ou relire quelques aventures : les Espions du ciel (il y a une illustration de couverture que je trouve très belle, celle sur fond rouge-orangé), une aventure lyonnaise (le Piano à queue ou L'homme au gant ; soyons fou : pourquoi pas les deux ?), la Pile atomique (je crois l'avoir apprécié d'une manière particulière celui-là ; était-ce seulement pour le voyage à vélo ?), les Voix de la nuit (le titre m'intrigue toujours autant), la Croix-Rousse (bien sûr) et l’Étang de Berre (un autre auteur que Bonzon).

Bonsoir Phileas Fogg et bienvenue parmi nous

Je découvre à l'instant ton message qui me replonge instantanément dans ces moments privilégiés de l'enfance où la lecture occupait une (très) grande place, dans une atmosphère assez semblable à celle que tu décris.
J'ai un souvenir assez précis d'une aventure des Six Compagnons, souvent relue car c'était la seule que je possédais : les Six compagnons y sont recrutés comme figurants pour le tournage d'un film dans une cité médiévale. Ils portent donc des costumes d'époque d'où le titre (les Six compagnons et la perruque rouge). Kafi participe également, grimé en loup apprivoisé par Sylvaine, la paysanne que joue Mady. Des bijoux disparaissent, Kafi échappe de peu à une tentative d'empoisonnement et on s'interroge sur Eliette, une jeune fille solitaire au comportement énigmatique.

J'ai lu beaucoup plus tard le premier opus (la Croix Rousse) : Est-ce dans celui-ci que Tidou bricole un caisson tiré par Kafi pour transporter Mady ? J'admirais moi aussi cette faculté d'adaptation dont le groupe faisait preuve en toutes circonstances et cette histoire de nuit à la belle étoile me donne envie de découvrir d'autres titres, dont "La Pile atomique".

Bonsoir Phileas Fogg et bienvenue sur le forum.

Chamane a écrit:

J'ai lu beaucoup plus tard le premier opus (la Croix Rousse) : Est-ce dans celui-ci que Tidou bricole un caisson tiré par Kafi pour transporter Mady ?

Non, pas exactement...
La bande, bricole une espèce de fauteuil roulant pour balader Mady.
De tous les 6C que j'ai lus, c'est celui que je préfère.

Les 6C, crée par P-J Bonzon est probablement la seule série qui décrit assez bien la France de l'époque.
Une France ouvrière, ou les mômes rêvent d'autres choses. Et le voyage c'est l'aventure à cette époque.

Chamane a écrit:

J'admirais moi aussi cette faculté d'adaptation dont le groupe faisait preuve en toutes circonstances et cette histoire de nuit à la belle étoile me donne envie de découvrir d'autres titres, dont "La Pile atomique".

Pour le tome 2, La pile atomique, j'ai la version numérique de très bonne qualité dispo
qui se lit sur un simple ordi ou smartphone¹.

¹) faut installer un lecteur "pdf"

Même si j'ai passé de bons moments avec Les 6C vers mes 12/14 ans, je n'en ai pas gardé d'aussi bons souvenirs que de mes Michel ou Langelot.
C'est probablement pourquoi (alors que j'ai encore tous mes 6C en BV de cette époque) je n'ai relu que Les compagnons de la Croix Rousse. Qui lui est hors concours de simplicité, d'émotion et de sincérité ! 
Les autres ? Bah si un jour j'ai du temps ... ce qui n'est pas la denrée dont je dispose le plus, même par temps de confinement... 

ValenteII a écrit:

Les 6C, crée par P-J Bonzon est probablement la seule série qui décrit assez bien la France de l'époque.
Une France ouvrière, ou les mômes rêvent d'autres choses. Et le voyage c'est l'aventure à cette époque.

La série des Six compagnons décrit une France ouvrière… 
Ça me frappe cette remarque ; c'est vrai que les personnages sont d'origine modeste ; j'avais oublié le contexte social (je n'ai pas encore relu la Croix-Rousse) ; Paul-Jacques Bonzon se contente de l'évoquer, non ?

Je me demande si la série a été lue par toutes les franges de la population.
Ayant trouvé par hasard trois aventures des Six compagnons dans une bourse aux livres, j'ai parlé de cette découverte à des amis.
La plupart connaissaient la série, à l'exception de deux d'entre eux, issus de familles "bourgeoises" ; ça m'a surpris, mais ils m'ont assuré n'en avoir jamais entendu parler ; coïncidence ou pas, ils ont tous les deux suivi leur scolarité dans le privé…

J'ai suivi une scolarité dans le privé, bien que de milieu modeste car ici, en Vendée, et en général dans l'Ouest, il était impensable de fréquenter le public pour des raisons... religieuses.  C'était le cas de la  majorité des élèves de mon collège, enfants d'ouvriers et d'employés et nous lisions tous les mêmes livres, le plus souvent reçus pour des anniversaires. J'y ai découvert la profusion avec une bibliothèque bien fournie,  au contenu quand même un peu orienté.

Phileas Fogg a écrit:

La série des Six compagnons décrit une France ouvrière… 
Ça me frappe cette remarque ; c'est vrai que les personnages sont d'origine modeste ; j'avais oublié le contexte social (je n'ai pas encore relu la Croix-Rousse) ; Paul-Jacques Bonzon se contente de l'évoquer, non ?

Plus jeune, j'ai commencé à travailler dans une banque.
Les banques adorent les statistiques, y en a sur tout : mariage, adultère, religion, suicide etc.
Ça permet de déterminer le « loyer de l'argent » et autres trucs pour gagner plein de brouzoufs
En 63 - date du 1ᵉʳ 6C - les ouvriers viennent de la campagne ou de l'immigration.
Beaucoup vont vivre plusieurs décennies dans des bidonvilles.
Les sanitaires, salle de bain sont rares.
Plus tard en faisant du SAV, beaucoup d'hôtels facturaient "la douche" parfois la couverture en plus.
Récemment, dans le Lot, j'ai appris qu'un village avait bénéficié de l'eau courant en 81 !
Regardez la première illustration couleur dans les Compagnons de la Croix Rousse. Quelle évolution avec 2020 !
En 63, la mère de Tidou n'est pas autorisé à ouvrir un compte bancaire sans l'autorisation du mari.
En 63, la contraception est illégale. Il faudra 67 avec la Loi Neuwirth autorisant la contraception.
Ne parlons pas des avortements (tricoteuse), "tarlouze" et autres violences...
Dans la série des 6C, très peu d'adultes sont cadres ou ont un statut de "nantis".
Ce n'est pas le cas dans Michel, ou les parents proposent un cadre de vie meilleurs à leurs enfants.
Et dans Langelot qui est orphelin, on sait que les parents ont pris le bateau France.
Une croisière inaccessible pour un "OS" du quai de Javel.

Phileas Fogg a écrit:

Je me demande si la série a été lue par toutes les franges de la population.

Parmi les statistiques, en "60", la Bretagne était très religieuse, l'école "privée" prévalait.
Pour la Vendée, je ne m'en souviens pas. Sans doute identique à la Bretagne.
Et au-dessus des religions et politiques, les rîtes et coutumes locales.
On imagine facilement des "instits", "profs" du laïque mettre leurs mômes chez des religieux.
Rien d'étonnant à proposer la BV dans les écoles "privées" ou "laïques".

Le Grand Charles avait sa constitution et « régnait » sur une France en pleine reconstruction.
Bonus pour le peuple, le Grand Charles était aussi un fervent croyant.
Tout une époque !

En lisant Michel, je vérifie et découvre l'histoire de cette époque.
Très amusant... Souvent triste pour ceux qui étaient en bas de l'échelle... avis perso

Bonne relecture.

Chamane a écrit:

J'y ai découvert la profusion avec une bibliothèque bien fournie,  au contenu quand même un peu orienté.

"Au contenu quand même un peu orienté", c'est-à-dire ?

L'un de mes deux amis qui n'avaient jamais entendu parler des Six compagnons lisait quant à lui, quand il était enfant (peut-être en dehors de l'école), une série totalement inconnue de moi pour le coup, intitulée "Le Prince Eric".
Une recherche sur Wikipédia permet d'apprendre que "Le Prince Éric est le nom d'une série de six romans de Serge Dalens, illustrés par Pierre Joubert, publiés à l'origine aux éditions Alsatia, dans la collection Signe de piste".
Au sujet de cette collection, on peut lire : "des tentatives régulières de récupération de cette collection ont eu lieu par des mouvements traditionalistes ou d'extrême-droite sous prétexte de scoutisme. La collection n'a pas un but scout même si elle énonce des sujets chers aux yeux des scouts".

ValenteII a écrit:

En lisant Michel, je vérifie et découvre l'histoire de cette époque.

Les aventures des Six compagnons, elles non plus, effectivement, ne sont pas complètement déconnectées d'un contexte socio-historique ; je me souviens de travailleurs immigrés espagnols dans L'œil d'acier.
Quant à la série Michel, je vais m'empresser de la découvrir dès que possible.

Phileas Fogg a écrit:

Les aventures des Six compagnons, elles non plus, effectivement, ne sont pas complètement déconnectées d'un contexte socio-historique ; je me souviens de travailleurs immigrés espagnols dans L'œil d'acier.

C'est certainement la série la plus « connectée » à son époque ! (avis perso)

Phileas Fogg a écrit:

Quant à la série Michel, je vais m'empresser de la découvrir dès que possible.

Rien de plus simple :
* voir le sujet sur le centenaire de Georges Bayard.
* contacter par MP le Lieutenant DCM
Je me cite

Valente a écrit:

Et je rappelle que ces Epubs à l'occasion du centenaire de Georges Bayard sont enrichies par :
* une préface de Michel Forcheron,
* adaptation de DCM, mieux que l'édition Hachette.
Michel Forcheron & DCM méritent l'habit de Seigneur pour leur travail !

On recherche justement des relecteurs/correcteurs pour cette série phare de la BV.

Phileas Fogg a écrit:

Chamane a écrit:

J'y ai découvert la profusion avec une bibliothèque bien fournie,  au contenu quand même un peu orienté.

"Au contenu quand même un peu orienté", c'est-à-dire ?

Je voulais dire qu'en fait, les religieuses et professeurs du collège exerçaient un contrôle sur toutes nos lectures. Il était interdit d'introduire une revue ou un livre non autorisé dans l'établissement (Les surveillantes de l'internat vérifiaient). Dans la plupart de nos classes se trouvaient des bibliothèques aux ouvrages soigneusement choisis et en rapport avec le programme scolaire mais tout de même assez plaisants  (Collection Spirale et Rouge et Or entre autres).
La plupart des livres étaient plutôt destinés aux filles puisque les classes n'étaient mixtes qu'à partir de la seconde. Et comme je le disais dans un autre sujet (resté d'ailleurs en suspens : le genre dans les livres d'enfants), nous n'avions pas accès aux Michel, Langelot etc... réservés aux garçons.

Pour ce qui est de Joubert et du Prince Eric, le spécialiste de la question sur le forum est Cedrix. Les illustrations me plaisent mais je n'ai jamais eu la curiosité d'en ouvrir un, sans doute à cause de ce contexte "para-militaire" qui n'est pas vraiment ma tasse de thé.

@Chamane
{HS}
Autre question Chamane.
* tenue spécifique à l'école privée ?
* pantalon autorisé pour les filles ?

Une personne m'avait rapporté que chez IBM, le pantalon était interdit dans les locaux.
Article du règlement intérieur de cette entreprise.
{/HS}

[ HS ] @  Valente II

Je suis entrée en 6e en 1973 : pas d'uniforme, pantalon autorisé. Seule obligation, la blouse. Mais les filles des années 60 ont connu l'uniforme et l'interdiction du maquillage.

{HS}
Merci pour cette réponse très complète.
J'avais même oublié le maquillage pour colorier la vie.
{/HS}