Rappel du premier message :Après avoir relu les 21 titres écrits par Enid Blyton, j'ai donc attaqué la relecture des titres écrits par Claude Voilier (j'en suis au sixième : « Le Cinq et les pirates du ciel »).
Je vais essayer de sortir des a priori, idées reçues et autres conflits des anciens et des modernes pour en faire une critique forcemment subjective, mais j'essayerai d'être le plus objectif possible...
Histoire de voir aussi ce que vous pensez de ces Club des Cinq, même si j'ai déjà une vague idée...
Contexte : « Le Club des Cinq en embuscade », dernier titre de la série écrite par Enid Blyton, paraît en France en 1968, l'année même de la dispartion de l'écrivain...
A ce moment, la série, très populaire, est un des piliers de la collection de la Bibliothèque Rose. La voir s'arrêter pose donc probablement un sérieux soucis à l'éditeur Hachette. L'idée sera donc de faire poursuivre la série par un autre auteur. L'éditeur se tourne alors vers Claude Voilier, qui connait le « Club des Cinq » pour avoir traduit trois des derniers titres parus en France, parmi lesquels se trouvent d'ailleurs le premier titre de la série...
Claude Voilier accepte la proposition, et va écrire 24 titres supplémentaires entre 1971 et 1985.
Je vais donc essayer de comparer les deux ensembles d'une façon générale, puis je posterai une petite analyse de chaque histoire du Club racontée par Claude Voilier. Car, comme pour celles écritent par Enid Blyton, il y en a certaines qui sont meilleures que d'autres (dixit La Palice !
).
Je précise que je me base sur les éditions du début des années 80s, illustrées essentiellement par Jean Sidobre, sauf pour les derniers titres, illustrés par Claude Pascal, Annie-Claude Martin ou Buci.
Présentation :Deux éléments frappent immédiatement le lecteur : la dualité texte – mini-BD et l'absence de chapitrage.
Pour ce dernier point, cela surprend au début, et on se perd un peu dans le texte. Mais c'est surtout une question d'adaptation, et on s'y fait... De mon point de vue, je préfère l'organisation en chapitre qui a l'avantage de structurer le texte. Il est à noter qu'un chapitrage sommaire apparaît à partir du quatrième titre de Claude Voilier, mais le découpage est purement fonctionnel, et ne marque pas de véritables chapitres de l'histoire...
L'idée d'illustrer le texte par son pendant en version « mini-BD » est originale au premier abord. Sauf qu'à y regarder de plus près, on s'apperçoie très vite qu'il est strictement impossible de suivre l'histoire en se contentant de lire la mini-BD ! Vous me direz sûrement que ce n'est pas le but, mais dans ce cas, pourquoi ne pas réaliser des illustrations classiques. Car, pour aggraver leur cas, les incohérences entre le texte des mini-BD et celui écrit par l'auteur sont considérables, et presqu'à chaque page ! Ainsi, ce qui est dit par l'un dans le texte peut se retrouver dit par un autre dans une vignette de la mini-BD ! Sans compter la modification, la simplification, voire l'ajout de texte !
Bref, c'est clairement ce qu'on appeler une « fausse bonne idée » ! Par ailleurs, l'éditeur a fini par s'en rendre compte, puisque ce format a été supprimé de l'édition 2000.
Conclusion : deux mauvais points sur la présentation ! Ca commence bien !
Scenarii :J'étofferai cette partie au fur et à mesure de mon avancement dans les relectures : pour l'instant, je n'ai relu que les six premiers...
Dans les grandes lignes, les différentes scenarii de Claude Voilier sont plutôt bonnes : la trâme se tient, les « méchants » sont crédibles, plus même que dans certains titres écrits par Enid Blyton... Il y a de l'action (peut être trop ?? j'y reviendrai), de bonnes intrigues,....
Bref, plutôt un bon point du côté des scenarii !
(sous réserve d'évolution...)
Ambiance :Là, c'est probablement le point le plus tranché, tant la différence entre les deux auteurs est prononcée ! Toute l'ambiance qui transparaissait dans l'oeuvre d'Enid Blyton disparaît complétement dans celle de Claude Voilier... Le plus caricatural des éléments est probablement la description des repas. Là où Enid Blyton prend le temps, par force détails, de nous décrire les repas des Cinq, l'ambiance, les discution, voire les jeux, etc..., bref en un mot l'atmosphère... Claude Voilier ne dit... rien !
Ou plutôt, nous fait comprendre qu'ils ont mangé par des début de phrases du type « Après le goûter, ».
Il en est de même généralement pour la description des paysages et des différents lieux que les Cinq visitent... Le texte reste sur les grandes lignes, et ne rentre dans le détail que lorsque l'action s'y déroule vraiment (et encore...).
Le seul type d'ambiance que Claude Voilier a réussi à recréer tout en étant crédible, c'est celles associées à un drâme imminant ou en cours, comme un incendit par exemple. Maigre lot de consolation...
Seule la fin de ces histoires, en arrivant sur le dénouement final, tient un peu en haleine, et parfois pas mal d'ailleurs... on sent la tension monter au fil des pages... Le rendu de cette phase du scenario vaut à peu près ce qu'Enid Blyton pouvait faire.
Par contre, il y a une grande différence entre la façon dont l'aventure se déroule suivant Enid Blyton ou Claude Voilier. Pour la première, les choses se mettent en place assez lentement : il faut parfois plus de la moitié de l'histoire pour réellement entrer dans le vif du sujet... Avec Claude Voilier, au contraire, les choses ne trainent pas : l'aventure débarque rapidemment sans crier gare, comme un cheveu dans la soupe ! Il n'y presque pas cette intrigue qui monte doucement, mais sûrement, en arrière-plan du texte... Le résultat est que les aventures des Cinq sous la plume de Claude Voilier se résument à des enquêtes policières. Ce n'est pas un mal en soit, mais comparativement aux aventures écrites par Enid Blyton, je trouve qu'on y perd beaucoup...
Conclusion : un nouveau mauvais point, mais qui pèse lourd, celui-là !
Les personnages principaux :Concernant nos cinq personnages préférés, je les répartirai en deux groupes : ceux qui ont à peu près bien supporté le changement d'auteur, et ceux qui en ont (terriblement) souffert.
Dans la première catégorie se trouvent Annie et... Dagobert ! Certes, pour ce dernier, c'est difficile de le transformer en profondeur !
C'est donc le personnage qui change le moins... Pour Annie, les changements sont plus subtiles : elle apparaît moins comme la joyeuse petite ménagère que nous décrivait Enid Blyton, mais reste la « froussarde courageuse » qu'elle était. Son rôle perd un peu en importance, mais ça, c'est logique, vu l'évolution des autres membres du Club...
Dans le seconde catégorie se retrouvent donc les trois autres : Claude, François et Mick. Là, le maître mot serait plutôt [mauvaise] caricature !
Claude apparaît comme colérique, trépidante, voire se la joue perso quand ses cousins sont en désaccord avec elle (quid de la solidarité du Club ??). Dès qu'il y a un exploit à accomplir, c'est sur elle que cela tombe, et rarement sur les autres. Par contre, adieu les bouderies légendaires (cf. « La locomotive... ») avec leçon de vie à la clé ! Les éventuels débats intérieurs que Claude se posait souvent, notamment sur son caractère « soupe-au-lait », existent encore, mais sont réduits à des interrogations sur les actions à mener, pas vraiment sur elle-même... Il est à noter, mais c'est finalement logique, que Claude se retrouve introniser « chef » du Club à partir de la troisième histoire de Claude Voilier. Alors que ce rôle, non-officiel, était plutôt dévolu à François pour Enid Blyton. Du coup, il y a de nombreuses séquences où on voit les cousins de Claude se contenter d'attendre sa décision !! L'antithèse presque parfaite du Club, version Blyton !
François, à mon avis, est le personnage qui perd le plus dans le changement d'écrivain : il n'est plus que l'ombre de ce qu'il fut sous la plume d'Enid... Lui qui prennait des initiatives parfois audacieuses en est réduit au rôle ingrat de « monsieur Sagesse », voire de conseiller peu écouté ! Bref, que du gratifiant !!
Mick, de son côté, est vraiment une caricature de ce qu'il fût ! Désormais, il se contente la plus part du temps de suivre ou d'imiter sa cousine... De plus, il devient « grossier », ce qui confère à Annie et François le rôle supplémentaire de correcteur du langage de Mick (mais jamais Claude, on se demande pourquoi ??) ! Autant je me reconnaissais dans Mick, version Blyton, autant dans celui de Voilier, j'avais plus de difficultés...
Conclusion : un mauvais point ! Et sans appel !
Les personnages secondaires réguliers :Là aussi, comme pour les membres du Club, on vire au stéréotype : la mère de Claude apparaît comme étant une femme fragile, tout en étant la bonté même. Alors que M. Dorsel, lui, reste cantonner à son rôle de savant n'aimant pas le bruit ! Dans certains titres de Claude Voilier, il se contente de saluer les enfants à leur arrivée aux Mouettes, puis disparaît complétement...
Triste nouvelle également que la disparition de Maria, la fidèle cuisinière des Dorsel ! Bien que son rôle fut limitée, elle apportait une touche d'humour et participait (bien malgré elle !!
)parfois même aux aventures du Club, comme dans « ... les gitans » ou « Enlèvement au Club des Cinq ».
Les parents Gauthier sont également aux abonnés absents. On se pourraient presque se demander quand ils voient leurs enfants : ceux-ci sont en internat toute l'année, et en vacances, chez leur cousine !...
Conclusion : encore un mauvais point....
Leur amis ou personnages occasionnels :Bien que cela soit plus difficile de faire une comparaison, je dirai simplement que ces personnages sont traités de façon plus superficielle par Claude Voilier qu'il ne pouvait l'être par Enid Blyton. Toutefois, cela ne porte pas de préjudice à l'histoire, et il faut bien reconnaître que sur ce point précis, elle reste globalement crédible.
Conclusion : un bon point ?...
Les ennemis :Je dirai que, sur ce point, Claude Voilier se situe sur la ligne d'Enid Blyton : les méchants le sont juste ce qu'il faut !
Dans certaines histoires, ils sont plus crédibles comme dans « Les Cinq au bal des espions », mais certains titres d'Enid Blyton ont aussi des méchants très crédibles, comme dans « Le Club des Cinq en vacances ». C'est peut-être donc le seul point qui se situe dans la ligne originale (sous réserve d'évolution suite à mes relectures...
).
Conclusion : un bon point.
Bilan :Hormi les aspects de présentation qui sont probablement plus dus à la volonté de l'éditeur qu'à Claude Voilier (d'autres séries auront aussi leur suite « illustrée »), cela nous fait donc trois mauvais points pour trois bons points ! Humm, match nul alors ???
Voire... Vu que ce qui primait réellement dans l'oeuvre d'Enid Blyton, c'était l'atmosphère, le caractère et l'évolution des personnages, plus que l'énigme ou l'aventure elle-même qui servait surtout de décor, on ne se retrouve pas dans l'oeuvre de Claude Voilier. C'est justement exactement le contraire qui se produit : l'énigme ou l'aventure est ce qui est important, l'atmosphère, le caractère des personnages, ou leur évolution passent au second plan, ou même disparaissent. Du coup, les Cinq se transforment en une sorte de Club de Super-Cinq (sans lien avec Renault
) ! Bref, des super-héros bien éloignés des enfants que nous décrit Enid Blyton...
C'est dommage, bien dommage...
@suivre !